Sherlock enquête
Cet été, ne voulant pas bronzer idiote, j'ai décidé de faire marcher mes
petits neurones et d'enquêter sur l'histoire de notre maison provençale.
En fait, je ne m'étends plus au soleil depuis bien longtemps.
Pas envie de ressembler à une vieille momie égyptienne !
L'été, nous habitons dans un village médiéval entouré de remparts.
Notre maison et celle de nos voisins ne formaient, autrefois, qu'une seule
et unique habitation. La maison a été divisée en deux à une date inconnue.
Les voisins ont hérité d'une tour appartenant aux anciens remparts et d'une belle
cour à arcades. L'historique escalier à vis, en pierre, a été pour nous :
Rassurez-vous, le reste de la maison a été entièrement transformé
et nous avons tout le confort moderne.
De la fenêtre de notre chambre, nous avons une vue plongeante
sur la cour des voisins et mon œil de lynx a été attiré par une inscription
gravée dans la pierre. En y regardant de plus près, on lit 1579 :
La date est suivie d'un prénom et d'un nom :
Nous avons fait des recherches sur Internet et nous avons trouvé un document
intéressant : François de Jarente (ou Gerente) s'est installé dans notre village
vers 1440. En regardant l'arbre généalogique de la famille, on constate qu'il
il y a bien eu un Gaspard de Jarente dans la période qui nous intéresse.
La famille Jarente (ou Gerente) est une vieille famille de Provence.
Notre escalier serait donc du XVIe siècle et non du XVIIe comme nous le pensions.
Mon projet estival était de découvrir le nom des différentes familles ayant
occupé la maison avant nous. Je suis donc allée à la mairie pour consulter les
anciennes matrices cadastrales. Chaque mairie doit conserver ces documents
depuis 1836 et n'importe qui peut les consulter. Voilà ce que l'on m'a présenté :
Certains livres ont brûlé et ceux qui restent partent en lambeaux. Il manque
au moins 500 pages (celles qui auraient pu m'intéresser, bien entendu).
Ces documents sont inexploitables, quel dommage !
Je vais devoir aller aux archives départementales à Valence pour
consulter ces mêmes archives, en bon état, je l'espère.
Un début de piste tout de même : en 1836, un certain
Jacques Vincent Marre habitait notre maison.
Grâce à Internet toujours, nous avons appris qu'il était né le 18 juillet 1799
et qu'il avait épousé Madelaine Fébrier le 30 août 1820. En 1822, ils ont
eu un fils Eugène. En 1836, Eugène, âgé de 14 ans, étudiait au
collège de la ville voisine. Les Marre était donc des gens aisés.
Jacques Vincent, expert du cadastre, fut maire du village
de 1829 à 1831. Pourquoi deux ans seulement ? Mystère.
Sherlock a flairé une autre piste : celle de la famille Roustan. Mais là, c'est
un vrai casse-tête chinois ! Dans cette famille, on est maçon de père en fils
et quand le fils porte le prénom de son père, c'est encore plus compliqué.
En 1891, Auguste Roustan, 49 ans, maçon, habitait dans notre maison
avec sa femme Marie, 43 ans et leur fils Émile, 9 ans.
Cinq ans plus tard, en 1896, Auguste est toujours maçon. Marie vit toujours
avec lui. Émile a grandi : à 14 ans, il n'est toujours pas maçon,
comme c'est bizarre ! Par contre, un autre fils vit avec eux : Abel,
23 ans qui est... cuisinier (un rebelle celui-là !).
Comment ai-je obtenu tous ces renseignements ? En épluchant
méticuleusement les listes des différents recensements qui ont eu lieu
dans ma commune entre 1836 et 1936 (un recensement tous les 5 ans
sauf pour la période 1911-1921). Ces documents étant numérisés, je
peux les étudier tranquillement chez moi mais vu qu'il y a entre 90 et 50
pages pour chaque recensement, je ne suis pas au bout de mes peines !
C'est un travail de fourmi mais c'est très intéressant pour connaître
l'histoire du village, alors je m'accroche. Mon projet va durer plus d'un été...